contagion lwright

Contagion, L. Wright

Contagion, L. Wright

Contagion, de Lawrence Wright (USA), Editions Le Cherche Midi, 2020

Synopsis :

En Asie, 47 personnes succombent à une mystérieuse fièvre hémorragique. Henry Parsons, épidémiologiste de renom, envoyé sur place par l’OMS, découvre à quel point le virus est contagieux. Lorsqu’il apprend qu’un homme contaminé est en route vers La Mecque où des millions de musulmans vont se retrouver pour le pèlerinage annuel, c’est le début d’une course contre la montre pour enrayer l’épidémie. Mais en quelques semaines seulement, le monde entier est touché et sombre dans une crise sans précédent. Aux Etats-Unis comme ailleurs, la maladie se propage, mettant à mal les institutions scientifiques, religieuses et politiques, et décimant une partie de la population. L’épouse d’Henry et ses enfants, restés sur le sol américain, sont confrontés à une situation potentiellement mortelle. Trouvera-t-on la solution à temps ?

Electrisant, hallucinant et, en un sens, historique, ce thriller hors-normes, qui rappelle les meilleurs ouvrages de Michael Crichton, nous propose une expérience peu commune. Conçu quelque semaines avant le début de l’épidémie du Covid-19 comme un roman d’anticipation, il a cessé d’en être un au moment même de sa parution, prenant ainsi un étrange aspect prophétique. En plus d’une intrigue d’un réalisme saisissant, qui tient le lecteur en haleine de la première à la dernière page, Lawrence Wright, prix Pulitzer, nous offre ici une étude passionnante sur les épidémies, leur histoire et leur prévention.

Avis : 4.8/5

Personnages : 5/5
Décors : 5/5
Trame : 4/5
Emotion : 5/5
Globale : 5/5

Le quatrième de couverture suffit amplement à fixer un regard dessus, surtout durant cette période de pandémie. Ajoutons l’ingrédient que Contagion a été rédigé par un Prix Pullitzer et tout est en place pour lancer une machine diabolique ! Verdict ? 

S’il réside dans ce roman beaucoup de personnages, je n’en ai retenus que quelques-uns qui me paraissaient les plus intéressants à aborder.
Le premier rôle revient évidemment à Henry Parsons, épidémiologiste au CDC, figure du parfait génie. Pourtant, Henry traîne des casseroles et pas des moindres ! Son passé se rappelle quotidiennement à lui du fait de son infirmité qu’il a réussi à retourner en véritable force. Vu qu’il traque le virus, on le suit de ville en ville, de périple en périple. Son côté héros ne transpire d’aucun cliché, ce qui le rend encore plus humain. J’ai apprécié ce personnage qui sort du commun et son humanisme. Sa femme, Jill, est admirable de courage, de bravoure et de self-control. Le couple a deux enfants d’âge moyen, Helen et Teddy. Si leur entente n’est pas toujours au beau fixe, c’est face à l’adversité que leur union va se renforcer. L’évolution de ces enfants m’a particulièrement plu, leur abnégation, leur bravoure.
La route d’Henry va croiser celle de quelques figures importantes. J’ai retenu le Prince Majid, bien plus qu’un noble, pour qui l’amitié et la fidélité ne représentent pas de vains mots. Le Capitaine Dixon ou même Murphy, bien qu’avec de plus petits rôles, forcent le respect avec leur code de l’honneur, du sacrifice et du don de soi-même.
Loin de tous se tient Tildy Nichinsky, secrétaire adjointe à la Sécurité intérieurs, carriériste, qui ne recule devant rien pour imposer deux choses : elle-même et son avis sur l’origine de la contagion. Inspirant la crainte, le respect et la peur, elle va forcer bien des barrages jusqu’à arriver au sommet.

Beaucoup de lieux sont visités et chacun est décrit à merveille par Lawrence Wright. On sent ici qu’il a pris le temps d’étudier les diverses scènes. Indonésie, Atlanta, La Mecque, l’Arabie Saoudite, Washington, une île oubliée de tous et même un sous-marin. L’auteur n’a pas omis les aspects religieux, politiques et géostratégiques – son côté journaliste s’en fait ressentir pour notre plus grand bonheur. Au fur et à mesure de la contagion, on suit la modification de l’urbanisme, la nature qui reprend ses droits, les gens en panique totale. La visite du laboratoire P4 m’a jeté un grand froid, en passant.

Le seul petit (mais alors très léger) bémol réside dans la trame. Il s’agit là d’un infime détail, vraiment, car le dénouement a été mené de main de maître. J’ai trouvé, par moment, que certaines scènes étaient trop faciles, l’issue trop grosse. Mais bon, mettons ceci de côté ! 
Le virus Kongoli menace d’emblée, pas le temps de tergiverser. On étudie un quelconque rapport avec des épidémies précédentes, surtout la grippe espagnole de 1918. Alors oui, il existe quelques points communs avec le COVID-19, mais de là à dire que c’était prophétique, non. Dans Contagion, la pandémie prend vite et fort. Les pays s’effondrent, partent en guerre armée ou cybernétique, on cherche le coupable. Les homosexuels sont pointés du doigt, puis les Musulmans, les Iranien, les Juifs, et les Russes. Pendant ce temps, le Kongoli mute encore et encore et aucun traitement à l’horizon pour ce virus d’un type jamais vu. Des morts, toujours plus de morts et des scientifiques impuissants.
Parfois, on plonge dans le passé d’Henri pour comprendre ses antécédents peu glorieux, ou l’on suit ce qui se déroule à Washington d’un point de vue politique. 
Le monde décrit par Lawrence Wright fait froid dans le dos et le final auquel je m’attendais m’a retranché dans mes réflexions les plus primaires. 
Ce thriller est palpitant et magnifiquement construit, les chapitres sont variés tant en personnages qu’en nombre de pages. Un sacré travail de fond a été nécessaire à l’auteur pour toucher autant de domaines en si peu d’espace.

Riche en émotions pourrait idéalement définir ce bouquin. A un détail près : il faudra mettre de côté ce qui ressemble à la joie. Comptez plutôt croiser du chagrin, de la solitude, du désespoir, de la peine. Laissez-vous envahir par l’inquiétude, la crainte, la panique, la terreur face au virus infiniment petit, la méfiance de l’autre. Politiquement, on ressent de la frustration, de la provocation, de l’énervement et une bonne dose de tension.

Contagion est un excellent livre ! Lawrence Wright l’a sorti juste avant le COVID-19 et c’est à double tranchants. Certains verront de l’attrait ou de la curiosité de lire un sujet d’actualité, d’autres en ont tellement ras-le-bol de ce que l’on vit depuis plusieurs qu’ils détesteront  ce sujet. Une chose demeure unilatéralement : ce roman est une fiction, mais la catastrophe reste plausible, au-delà de notre volonté…